Entretien avec Stephen Breyer, Juge à la Cour Suprême des Etats-Unis
Paris – Mai 2019
Stephen Breyer est francophile depuis longtemps, et donne régulièrement des entretiens pour la presse, radio et télévision française. Il a travaillé très tôt comme assistant à la Cour Suprême des Etats-Unis (auprès du juge Arthur Goldberg) et est devenu professeur de droit à la Harvard Law School. Juge fédéral entre 1980 et 1994, il est nommé à la Cour Suprême par le Président Bill Clinton.
Voici un document audio de 30 minutes où vous entendrez comment se construit la pensée de Stephen Breyer à partir de quelques questions que je lui ai posées. Le fil d’une sorte d’ « ingénierie » de la fonction de juger s’y perçoit, entre art et technique, dans le cadre d’une philosophie plutôt réaliste. Est abordée la question de la différence de nature entre droit et politique et on mesure une préoccupation franche de Stephen Breyer devant la difficulté de la Cour suprême et de ses juges à ne pas apparaître comme un tribunal politique : en dépit de ce qu’il s’agit d’intervenir à propos de questions qui ont une grande audience politique (peine de mort, IVG, détention d’armes, financement de la vie politique par ex.), Stephen Breyer estime que les juges ne font toujours que juger, et certainement pas de la politique. Est abordée aussi la question de la fonction des opinions séparées dans le rendu de la justice et la question du rapport des individus et des groupes d’individus au texte constitutionnel, aux Etats-Unis et en Europe.
Stephen Breyer est très impliqué dans la réflexion intellectuelle autour de la démocratie, des libertés et de la justice constitutionnelle. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur la Cour suprême, son histoire et son rôle, dont 3 ont été traduits en français chez Odile Jacob (Pour une démocratie active, 2007, La Cour Suprême, l’Amérique et son histoire, 2011, La Cour Suprême, le droit américain et le monde, 2015).
Réputé « libéral » et démocrate (voyez cet article intéressant au moment de sa nomination à la Cour suprême), la pensée du juge Stephen Breyer sur la fonction de juge est pleine de subtilités et ne peut pas s’apprécier en une seule fois. Il faut y revenir beaucoup pour se faire une idée. Ce qui marque peut-être d’abord est une forme apparente d’intransigeance dans sa conception du rapport entre le droit et la politique, qui ne doit pas être pensé avec trop de « subtilités » comme il le dit.
Je devais au départ retranscrire notre entretien dont certains éléments se trouvaient aussi un peu en dehors de l’enregistrement, en «reprenant » certaines formulations. Mais, en le ré-écoutant, il m’a semblé qu’il était bien plus judicieux de préserver l’authenticité de la pensée de Stephen Breyer dont la maîtrise du français est excellente : certaines erreurs mêmes lui donnent encore plus de poids et permettent, parce qu’on les entend, d’affiner notre propre pensée : j’ai donc gardé l’enregistrement « brut », avec le bruit autour.
Bonne écoute !
Lauréline Fontaine